Tramway vs BHNS : Le Pradet Environnement dénonce un choix politique sans justification
Nous poursuivons notre tour des contributions à l’enquête publique sur le projet BHNS, qui s’est achevée le 25 juin 2025. Nous avons déjà publié notre analyse sur les risques juridiques liés aux aménagements cyclables. La contribution suivante a été rédigée par les ami·e·s de l’association Le Pradet Environnement, que vous pouvez suivre sur leur page Facebook.
La Métropole de Toulon Provence Méditerranée est équivalente en termes d’habitants à celle de Grenoble (433 000 hab), Saint Etienne (403 000 hab), Nice (560 000 hab) avec pour cette dernière une géographie à peu près semblable à la nôtre, à savoir une métropole coincée entre mer et montagne. Toutes trois desservies par un tramway avec une physionomie et un cadre de vie profondément améliorés.
A l’inverse, sans transport en commun digne de ce nom, les habitants de MTPM perdent de nombreuses heures de vie dans des embouteillages et ce depuis des décennies. Et les propositions décrites dans le document de l’enquête publique sur le développement et l’amélioration d’un transport en commun digne de répondre aux besoins des citoyens des 12 communes sont loin de correspondre aux attentes.
Nous ne comprenons toujours pas, aujourd’hui ce qui a motivé les décideurs à abandonner le tramway au bénéfice du BHNS, comme le souligne la Mission Régional de l’Autorité environnementale (MRAe) «Une présentation de l’historique complet du projet de transport en commun en site propre et de ses évolutions (tramway puis diverses versions de BHNS) permettrait d’éclairer le public et de conforter la justification du projet retenu. ». Mais aucune présentation n’a été faite.
Nous dénonçons également le fait qu’il n’y ait eu aucune étude comparative entre l’un et l’autre qui aurait pu expliquer ce changement. Là encore la MRAe «recommande de compléter la justification des choix en présentant et comparant les solutions alternatives étudiées pour le mode de transport, le tracé de la ligne, la localisation et le dimensionnement des parcs relais »
Les critères de choix d’un Transport en Commun en Site Propre s’appuient sur :
- Le niveau de population dans l’agglomération
- la fréquentation journalière potentielle
- La capacité en heure de pointe
- la vitesse
- la régularité
- le confort
La Fédération Nationale des Usagers du Transport (FNAUT) définit trois arguments simples et essentiels suivants :
- capacité et attractivité
- avantage économique
- structure du parcours
1. Les critères de choix :
Niveau de population
Tenant compte du niveau de population, le PDU 2005-2015 prévoyait deux lignes de TCSP (2010 et 2015) sur deux axes lourds (Est/Ouest et Nord/Sud) qui méritaient un tramway et trois ou quatre lignes secondaires desservies par un BHNS. Ce projet a été abandonné en 2007.
La fréquentation journalière potentielle
Dans un PDU antérieur (2005-2015) la fréquentation était estimée à 160 000 voyageurs/jour. Dans le projet qui nous est présenté aujourd’hui les estimations s’élèvent à 142 000 voyageurs/jour pour 2038-2058. Pourquoi cette baisse de fréquentation ? Les chiffres seraient-ils adaptés au projet politique de MTPM (BHNS plutôt que Tramway) plutôt qu’aux réels besoins de la population Métropolitaine en 2038 ?
En 1975 il était question de transporter 60 000 voyageurs/jour sur l’axe Est-Ouest. Aujourd’hui l’étude projette un transport de 35 000 voyageurs/jour en 2035 ! Pourquoi cette régression sachant que 150 000 personnes habitent à moins de 200m de cet axe ? Une adaptation à la capacité d’un BHNS défendu contre un tramway ?
La capacité
Comme le dit la FNAUT, le tramway est beaucoup plus ambitieux que le BHNS. Quand on remplace une ligne de bus ordinaire (en site banalisé) par un BHNS la clientèle augmente en moyenne de 30 à 40%. Avec un tramway l’augmentation est en moyenne de plus de 100% (131%) ; le report modal est donc nettement plus important.
La structure linéaire du tracé assure le succès de tramway et sa fréquentation sera supérieure aux prévisions. Or avec un BHNS la longueur maximale avec un bus bi-articulé est de 24 m et transporte 150 personnes. Impossible de la rallonger car au-delà on perd la souplesse pour le manœuvrer. Un tramway transporte plus de 300 personnes et on peut y rajouter des rames.
La population toulonnaise exige une vision à long terme et demande que ce transport en commun soit non seulement efficace aujourd’hui mais aussi adaptable sur des décennies. En 2009 dans son étude, le CERTU défendait le tramway comme seul mode de déplacement capable de transporter le maximum de voyageurs, demain. Il soutenait aussi le besoin d’un mode de transport avec une moindre emprise au sol, tant en ligne droite qu’en virage, laissant plus de places pour les modes doux.
La réponse BHNS ne correspond en rien à ces propositions.
Pour exemple, Caen avait opté pour un BHNS, vite saturé et a dû le remplacer par un tramway pour une véritable efficacité qui réponde aux besoins des usagers.
Que l’expérience nous serve ; ne commettons pas les mêmes erreurs !
Vitesse, régularité
Étant 100% en site propre, le tramway est plus rapide et plus régulier sur ses horaires ; Le BHNS ne sera en site propre que sur 70% de son tracé. De plus sur trois lieux (la Seyne, St Jean du Var et La Coupiane), la largeur des bus ne leur permettra pas de se croiser à ces endroits- là. Dans le sens Ollioules La Pauline le bus sera en site propre, dans le sens inverse il sera dans le flux des voitures. Sur le Bd de Strasbourg vingt et un bus circulent aujourd’hui. Avec le BHNS certains disparaitront mais six à huit seront maintenus et emprunteront le Tracé du TCSP.
Toutes ces décisions, imposées par le choix d’un BHNS plutôt qu’un tramway, contrarient fortement la vitesse et la régularité.
Le confort
Toutes les études démontrent l’avantage du tramway sur le BHNS en matière de confort.
2. Pollution
Parmi les onze domaines d’actions du PDU fixés par la loi (PDU 2015-2025), nous relevons :
- L’équilibre durable ente les besoins en matière de mobilité et la protection de l’environnement et de la santé des populations.
- La diminution du trafic automobile
- L’amélioration du transport des personnes des entreprises et collectivités
Toulon est 20ème sur 20 dans le classement national des Métropoles, avec la plus grande part de déplacements en voiture, conséquence de choix qui ont priorisé la voiture pendant 40 ans : 1er tunnel, 2nd tube, élargissement de l’autoroute, parking en centre-ville…
Toulon, une ville qui n’est pas apaisée, où l’espace public est confisqué par la voiture, où les enfants n’ont aucune autonomie de déplacements à pied ou en vélo compte tenu de l’insécurité que représente la voie publique.
Toulon, une ville polluée où le 21 juin 2025 le préfet du Var a déclenché une alerte pollution à l’ozone de niveau 1 imposant une diminution de 20km/h aux engins motorisés.
Toulon, une ville qui aurait pu, avec un tramway, développer des puits de fraîcheur mais qui n’offrira avec un BHNS que des bandes goudronnées …
Pour toutes ces raisons, nous considérons que ce projet qui nous est présenté aujourd’hui à l’enquête publique n’est en aucune façon ni un projet d’utilité publique ni d’intérêt général.
Pour le Pradet Environnement
Chantal Mouttet
Présidente